Voyage à Washington

Washington DC

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Depuis petite, les longs voyages me rendaient indéniablement nerveuse. L’avion m’effrayait et la route me rendait malade. Généralement, je me privais de ces voyages qui en faisaient rêver tant et préférais rester à la maison. Quand Luka m’avait proposé de l’accompagner chez ses parents à Washington, je n’avais pas pu refuser. Je savais que cette visite comptait beaucoup à ses yeux d’autant plus que cela faisait des années que je n’avais pas vu sa famille. Ce week-end de retrouvailles nous permettrait d’officialiser notre couple face à eux, mais aussi de présenter Maddox à ses grands-parents paternels. En même temps, je visiterais Washington pour la première fois, Luka me jurant qu’il m’y ferait découvrir les plus beaux endroits. Il prévoyait déjà m’emmener dans l’un de ses restaurants préférés.

L’avion quitta le tarmac à l’heure et nous devrions être là-bas avant le diner. Là-bas, ses parents devaient nous cueillir à l’aéroport. Le décollage se fit sans anicroche et une fois l’altitude de croisière atteinte, j’avais rapidement oublié mes craintes. Déjà, Maddox m’avait tenue occupée pendant toute la montée en pleurant à s’en époumoner.  S’il était généralement un bébé assez facile à consoler, cette fois-ci, il ne voulait rien entendre. Il n’avait pas fait sa sieste, ses oreilles lui avait fait mal lors du décollage et maintenant, il paniquait refusant de boire, de manger, de jouer et s’entêtant à ne pas dormir. J’avais fait les cent pas dans le corridor quelques minutes croyant parvenir à le calmer ainsi. Autour, les autres passagers ne se gênaient pas de nous foudroyer du regard.

Après plus d’une quarantaine de minutes, le petit blond s’était enfin assoupi dans ses sanglots, le nez coincé contre mon poitrail. Son visage encore rougi par l’effort et les joues inondées par les larmes. Je jetai un regard soulagé dans la direction de Luka, frictionnant répétitivement le dos courbé de notre fils. Si pendant tout le temps que j’avais été occupée, je n’avais pas ressenti le mal du transport, maintenant que je me posais, je sentais les maux de cœur m’assaillir.

« Tu pourrais le prendre un instant? »

Doucement, je laissais Maddox aux bras de son père. Ce matin, la nervosité m’avait empêchée d’avaler quoi que ce soit. Les nausées s’intensifiant, j’abandonnais Luka pendant plusieurs minutes pour aller au cabinet. Mon corps trouvant le moyen de vomir le contenu de mon estomac vide. Quand enfin je trouvai la force de revenir à ma place, je m’étais appuyé la tête contre l’épaule de Luka m’assoupissant presque aussi rapidement que Maddox, littéralement vidé de toute énergie.

Washington DC

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]À la sortie de l’avion, j’étais totalement lessivée et encore nauséeuse du mal des airs. Au retour, les comprimés de Dramamine seraient non-négligeables. Luka récupérait notre valise et j’attrapais la poussette de Maddox qui suivait sur le carrousel. Contrairement à ce qu’il avait dit, les parents de Luka n’étaient pas venus nous chercher. Un homme nous expliqua vite fait qu’il nous conduirait, les plans ayant changés à cause d’un imprévu de dernière minute. Je ne masquai pas ma surprise de voir une limousine nous attendre. N’était-ce pas un peu trop? Une aussi grosse voiture pour nous trois? L’absurdité des gens riches ne cesseraient donc jamais de m’étonner. Toute cette exubérance me rappelait la raison pour laquelle je fuyais les réunions familiales comme la peste. Financièrement, les Thompson et les Cooper jouaient dans les ligues majeures. Le regard que me lançait Luka ne se voulait pas rassurant, lui-même semblait craindre ce qu’on nous réservait comme surprise.
La voiture prit la route nous menant directement à destination. Là-bas, un cinquantenaire au visage vaguement familier nous accueillit. Sans pouvoir me rappeler son nom, je me souvenais de l’avoir connu. D’emblée, Luka présenta Maddox comme notre fils me laissant douteuse de cette approche. J’entrais à sa suite, lui parlant tout bas.

« Tu ne crois pas qu’on devrait … mettre la table avant de tout dire! »

Lui proposais-je de peur que nos inconduites amoureuses nous apportent des jugements inopportuns. Sans qu’il ait le temps de me répondre, nous passions déjà la porte du salon de suite accueillit par sa mère. Pour une raison qui m’échappait, Luka n’avait pas informé sa famille de ma présence. Elle me saluait bien froidement, son regard me détaillant avec dédain, elle ordonnait d’installer la chambre d’ami pour nous avant de se questionner au sujet de Maddox.

« Il … »

Mais Luka me coupait l’herbe sous les pieds me faisant littéralement grincer des dents. Déjà que je ne me sentais pas à l’aise, rien n’aidait et ça encore moins. Masquant mon agacement d’un sourire, j’accordais mon attention à Alice.

« Oui, je me souviens. Je suis contente de te revoir! »

Dis-je à sa jeune sœur, m’approchant et lui faisant la bise par pure politesse. J’étais très mal à l’aise regrettant clairement mon choix de l’avoir accompagné. Déjà, le voyagement avait été une catastrophe. Je me sentais faible d’avoir été malade. Mes blessures et mes côtes me torturaient toujours autant. Avec cette accueille peu chaleureux de la part de sa mère, j’angoissais. Tout me semblait pire. En fait, j’avais envie de crier sur Luka. Pourquoi ne leur avait-il donc pas dit que je venais avec lui? Savait-il que sa mère, pour quelle raison qui soit, me considérerait de la sorte? Littéralement, j’avais envie de disparaitre. Les deux femmes s’éloignaient Luka me retenait me faisant part de ses inquiétudes. Tout de suite, je me sentis bouillir.

« Toi? Tu n’es pas sûr de vouloir rester? Tu ne leur as même pas dit que je venais! Ta mère me regarde comme si je portais une maladie infectieuse rare!»

Lui fis-je savoir, assez bas pour que lui seul m’entende, mordant dans mes mots peu heureuse de me retrouver ici, comme un poisson hors de l’eau. Tout ça n’avait rien de ce que je m’imaginais d’un week-end agréable en famille. Mon humeur était étrangement fragile. J’étais à la fois en colère, anxieuse et sur le point de fondre en larme. Probablement était-ce la fatigue, la nausée ou encore le fait de ne pas avoir mangé de la journée qui me mettait dans un tel état.

« Il est un peu trop tard pour changer d’avis. On peut toujours aller à l’hôtel? »

Lui proposais-je, tentant de trouver une solution. Je ne me sentais pas la bienvenue et si ça durait, je ne me voyais pas rester ici.

Washington DC

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] J’essayais surtout de ne pas laisser ma mauvaise humeur transparaître. Je commençais à regretter mon choix d’avoir accompagné Luka ici. L’ambiance est lourde et à peine Luka n’a le temps de me répondre que son père fait son entrée. Instantanément, sa bonne humeur vint détendre l’atmosphère. Il accueillait Luka d’une chaleureuse accolade avant de m’adresser la parole. Père et fils se ressemblait. Ils partageaient les mêmes expressions, le même regard et le même sourire. C’était même assez frappant de les voir un à-côté de l’autre. L’âge et les cheveux gris étaient leur seule différence. Dès lors, je compris qu’au contraire de sa mère, Luka avait déjà mis son père en confidence. Quand même un peu gêné par ses compliments, mon regard se tourna vers Luka lorsque son père parla de demande. De quelle demande parlait-il? Sans nous laisser le temps de dire quoi que ce soit, il enchainait en justifiant la réaction de sa femme. Semblait-il que cette dernière me portait une certaine rancœur? Promettant de nous servir de médiateur, il s’occupait déjà de mettre au clair la situation en demandant qu’on nous prépare une chambre que l’on pourrait partager. 

Nous nous retrouvions tous dans la grande salle à manger et tout de suite, le sujet de Maddox revenait sur la table. Malgré tous les efforts du patriarche, la tension demeurait et son petit jeu de devinette ne sembla pas réjouir la majorité de l’audience. Pinçant les lèvres, je ne trouvais rien à redire ayant l’indescriptible envie de disparaitre dans le décor. Sa sœur avait misé juste. 

« C’est une longue histoire… » 

Avouais-je craignant qu’on m’accuse d’avoir caché mon fils. Je ne voulais pas devoir me justifier ou m’excuser de quoi que ce soit. Je préférais que l’on évite le sujet. La tension entre Luka et sa sœur devenait aggravante. J’ignorais comment réagir et surtout, je ne comprenais pas ce qui motivait cette hargne fraternelle.

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La situation allait de mal en pire. Le père de Luka venait d’annoncer à tout le monde que Maddox était notre fils et voilà que la colère de sa mère atteignait son summum. Cette journée ne pouvait pas être plus merdique qu’elle ne l’était déjà. À mes côtés, Luka s’énervait aussi, répondant du tac au tac aux reproches que sa mère lui faisait. Pour ma part, j’étais prête à partir, à reprendre l’avion et à retourner en Nouvelle-Orléans. Sans plus attendre, Luka m’invita à le suivre. Il avait besoin de souffler. J’avais voulu récupérer Maddox mais Luka me fit comprendre que son grand-père en prendrait bien soin.

Une fois à l’extérieur, je m’étais éloignée de mon chéri. Inspirant longuement sentant que j’allais exploser. À ce moment précis, je lui en voulais de m’avoir fait faire ce voyage sans m’avertir que sa mère serait si peu heureuse de me voir. Les dents serrées, je me retenais de ne pas lui hurler dessus. Je devais me calmer, sinon j’allais littéralement arracher la tête à quelqu’un. Luka vint à moi, posant une main sur la taille afin de m’attirer à lui sans savoir que ce geste allait faire exploser la bombe.

« Pourquoi est-ce que tu m’as emmenée ici? TU SAVAIS QUE C’ÉTAIT UNE MAUVAISE IDÉE!»

L’accusais-je, sans prendre de pincette. Mon humeur ne s’améliorait pas, la déception et la frustration étaient amplifiées par la fatigue, la nausée et les douleurs de mes blessures.

« Tu vois, elle me déteste. Elle déteste Maddox, ta sœur partage visiblement son avis! Et qu’est-ce qu’elle dirait si nous avions une famille, si j’étais enceinte maintenant? Et … pourquoi est-ce que ça changerait quelque chose à sa vie à elle! Que tu m’aimes? Qu’on ait des enfants? Que Maddox soit ton fils! Il est petit, mais il peut comprendre, il doit être extrêmement perturbé en ce moment. Et toi, tu le laisses avec des gens qui lui sont totalement inconnus!»

Lui balançais-je d’un seul trait. Cela faisait maintenant plusieurs jours que je ne me sentais pas bien. J’avais du retard dans mes règles et voilà qu’aujourd’hui, en dépit du voyage en avion, j’étais incapable d’avaler quoi que ce soit. Je n’avais pas fait de test et espérais franchement ne pas devoir en faire un, mais je doutais être enceinte. Nous n’avions pas été responsable et nous ne nous étions pas protégés, les chances étaient grandes que notre famille s’agrandisse plus rapidement que prévu. Voilà qui ne réjouirait pas la mère de Luka.

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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] J’étais hors de moi et en colère d’être ainsi traité par la famille de Luka. Nous qui pensions avoir droit à une fin de semaine tranquille en famille, nous nous étions trompés sur toute la ligne. À peine arrivé, on se retrouvait sur le seuil de la porte à nous engueuler comme un vieux couple. Luka n’était pas responsable du comportement de ses parents mais il aurait pu ajuster le tir en avisant sa mère de ma présence. Qu’elle soit inquiète ou pas, elle ne demeurait pas moins méchante dans sa façon de m’accueillir. C’était eux qui avaient déménagé, c’était eux qui avaient emmené leur fils à Washington. C’est elle qui était la responsable de sa souffrance. Moi? À l’époque, je n’étais rien de plus qu’une adolescente. Je laissais la parole à Luka, l’écoutant, les bras croisé et le regard baisé, inspirant un bon coup pour tenter de me calmer. Je me taisais, sachant que tout ce qui sortirait de ma bouche serait une insulte envers la famille de mon bien aimé et je ne souhaitais pas continuer l’engueulade. Il n’arrivait pas à me convaincre. Une dernière chance? Pas si, sa mère, elle-même, ne s’excusait pas de se conduire comme une enfant de 8 ans. Je m’en tenais à me prononcer seulement au sujet de Maddox, le reste, il allait devoir assumer que je ne serais probablement aussi douce et gentille qu’il l’espérait. Non, je n’accepterais pas un regard méprisant de plus ou une autre remarque cinglante de la part de qui que ce soit.

« C’est n’est pas parce qu’il ne pleure pas qu’il ne me cherche pas! Et qu’il n’est pas inquiet! »

Je connaissais mieux mon fils que quiconque et non, Maddox n’était pas le genre à pleurer pour si peu. Avec toute l’hostilité qu’avait eu sa grand-mère, il n’était visiblement pas le bienvenu non plus. Quoi que je dise, Luka me fit comprendre de le suivre à l’écart, à l’abris des regards. On devait parler.

« Je ne suis pas prête à déménager Luka… »

L’idée de quitter mon appartement me causait beaucoup de stress. Là-bas, j’étais bien. J’y habitais depuis 4 ans et je m’y sentais en sécurité, surtout avec Jeremiah qui habitait avec nous. Il prenait mon visage dans ses mains et m’embrassait.

« Je ne sais pas, je n’ai pas fait de tests encore… mais je n’ai pas eux mes règles depuis trois mois maintenant. Depuis ma sortie de l’hôpital, et là, j’ai la nausée tous les jours. J’ai la poitrine qui me fait un mal de chien... À notre retour, je ferai le test, je ne veux pas t’écarter Luka. »

Lui expliquais-je, non, officiellement, je n’avais pas fait de tests mais voilà que mon corps me faisait sentir comme tel.

« Je n’ai pas envie de rester… pour être honnête. »

Mais avais-je vraiment le choix? Nos billets de retour n’étaient pas avant lundi et je n’étais pas prête à reprendre l’avion de sitôt. Là, maintenant, j’avais besoin de retrouver mon fils, de me reposer et de manger un petit quelque chose.

« Tu ne connais pas un endroit pas loin où on pourrait aller manger? Juste… le temps que la poussière se dépose? »